Nous vous en parlions cet été, notre association a initié la réalisation d’un atlas de la biodiversité sur la commune de Verneuil-sur-Seine. L’Eté a été riche en observations et il est maintenant temps de dresser un premier bilan des inventaires réalisés.
Pourquoi un atlas de la biodiversité à Verneuil ?
D’abord il s’agit de dresser un inventaire le plus complet possible des espèces animales et végétales présentes sur la commune, mais aussi des habitats naturels ainsi que l’identification des continuités écologiques. Dans un second temps, différents niveaux d’enjeux pourront être définis afin d’orienter la politique d’aménagement du territoire de la commune. Enfin des propositions d’actions et d’aménagements sont faites afin d’améliorer la capacité d’accueil pour la biodiversité mais aussi la circulation des espèces.
La biodiversité sur le territoire communal était déjà relativement bien connue puisque, préalablement à la réalisation des inventaires, nous avons pu récolter plus de 26 000 données préexistantes concernant 1 474 espèces animales et végétales. Ces données sont issues de naturalistes locaux mais aussi des principales bases de données naturalistes en Île-de-France que sont Faune-Île-de-France, Cettia Île-de-France ainsi que l’INPN (Institut National de Protection de la Nature) et la base de données Flora du CBNBP (Conservatoire Botanique National du Bassin Parisien).
Fort de cette connaissance du territoire et avec l’aide de notre stagiaire, Clément Bourdon, étudiant en BTS GPN (Gestion et Protection de la Nature) nous avons pu diviser la commune en différents quartiers homogènes et ainsi orienter les inventaires sur des secteurs jusqu’ici peu prospectés.
On remarque assez rapidement que plusieurs quartiers sont riches en observations. Le Bois de Verneuil est bien connu puisqu’il fait l’objet d’observations depuis de nombreuses années et l’AEV (Agence des Espaces Verts) y a mené plusieurs études ces dernières années (flore et chauves-souris). Les étangs des bords de Seine font l’objet d’un suivi régulier des ornithologues de la LPO (Ligue de Protection des Oiseaux), ce qui explique les 11000 observations sur ce secteur. Sur le quartier des Clairières, la quasi-totalité des observations et des espèces recensées sont des papillons de nuit puisque Philippe Mothiron (https://www.lepinet.fr/), spécialiste des hétérocères, réalise des inventaires dans son jardin depuis plus de 30 ans.
Par ailleurs, les Hauts de Verneuil et la plaine agricole souffrent d’un manque d’observations assez marqué.
Durant l’été quelques secteurs ont fait l’objet de prospections spécifiques, comme le parc de l’école Notre-Dame-les-Oiseaux, le parc du Talweg, les jardins familiaux, la résidence la Garenne et l’aérodrome des Mureaux (sur la partie Verneuil-sur-Seine).
Ainsi entre fin mai et novembre 2020, près de 1900 observations ont été réalisées sur presque 700 espèces animales et végétales. Les découvertes ont été nombreuses avec 167 nouvelles espèces qui n’avaient jamais été observées sur la commune : 65 espèces de plantes, une espèce d’amphibiens, 99 espèces d’insectes, une espèce de crustacées et une espèce d’arachnides.
Nous vous proposons un tour d’horizon des différents quartiers avec quelques observations notables
L’aérodrome/zone industrielle/voie ferrées :
Les inventaires sur l’aérodrome sont certainement les plus marquants de cette année et les découvertes nombreuses, notamment en botanique avec plusieurs espèces menacées en Île-de-France comme l’Arabette glabre (Turritis glabra) et certaines, très rare et magnifique, comme la Jasione des montagnes (Jasione montana). Les insectes ont également été à l’honneur avec des espèces thermophiles comme le Gomphocère tâcheté (Myrmeleotettix macualtus) et le Criquet des jachères (Chorthippus mollis) respectivement « quasi-menacé » et « vulnérable » sur la liste rouge des orthoptères d’Île-de-France. On peut également citer le Fourmillion longicorne (Distoleon tetragrammicus) protégé dans notre région.
Le Bois de Verneuil :
Malgré les études récentes quelques espèces botaniques ont été découvertes comme la Laîche printanière (Carex caryophyllea) et la Spergulaire rouge (Spergula rubra). Chez les oiseaux, on note la présence du Gobemouche gris (Muscicapa striata), identifié grâce à un piège photographique, il n’avait jamais été observé dans le Bois de Verneuil.
Une observation de Grenouille rousse (Rana temporaria) est également à noter car si elle n’est pas rare il s’agit de la première observation de l’espèce sur la commune.
Le centre-ville :
Le parc de l’école Notre-Dame-les-Oiseaux a fait l’objet de plusieurs observations intéressantes. Notamment l’abondance de fleurs comme la Scabieuse colombaire (Scabiosa colombaria) dans les prairies est particulièrement favorable aux insectes comme l’Andrène de la scabieuse (Andrena hattorfiana), une abeille solitaire qui ne butine qu’un nombre restreint de fleurs mais avec une grande efficacité !
Les vieux arbres et le bois mort laissé au sol est particulièrement important pour les coléoptères saproxylophages comme la Lucane cerf-volant (Lucanus cervus) et la Lepture couleur d’or (Leptura aurulenta).
Les étangs des bords de Seine :
Ce vaste secteur a fait l’objet de plusieurs sorties mais malgré tout il reste des choses à découvrir. Verneuil à la chance d’avoir encore une forêt rivulaire préservée et des étangs particulièrement intéressants pour les oiseaux d’eau.
Les berges exondées de l’étang du Rouillard accueillent l’Ecuelle d’eau (Hydrocotyle vulgaris), rare et déterminante ZNIEFF, il s’agit de la première mention pour la commune. On peut également citer la Menthe pouillot (Mentha pulegium) déjà connue de ce secteur ainsi que le Geléopsis à feuilles éroites (Galeopsis angustifolia), extrêmement rare, dont la station historique a été retrouvée sur la digue de pierre de l’étang du Gallardon.
Chez les insectes, le Sympetrum sanguin (Sympetrum sanguineum), une espèce de libellule commune mais qui n’avait encore jamais été observée sur la commune. L’Œdipode aigue-marine (Sphingonotus caerulans), très rare et déjà connu des abords de nos voies ferrées, semble avoir colonisé les sols pionniers de la « zone lunaire » à l’extrémité du Gallardon.
Les Hauts de Verneuil :
C’était l’un des quartiers de Verneuil les moins connu en matière de biodiversité et sur lequel nous avons concentré nos efforts autour du parc du Talweg et des jardins familiaux.
Une photo envoyée par l’une de nos adhérentes a permis de confirmer que le Triton palmé (Lissotriton helveticus) était bien présent dans les jardins autour du parc du Talweg et une sortie nocturne nous a permis d’entendre le chant de l’Alyte accoucheur (Alytes obstetricans) et même de l’observer et de le photographier. Cette espèce est assez facile à entendre mais particulièrement discrète et difficile à observer. De plus des têtards de ce crapaud ont été découverts dans la mare des jardins familiaux.
On peut également citer le Clairon des abeilles (Trichodes apiarius), coléoptère déterminant ZNIEFF, dont les larves se nourrissent de larves d’abeilles sauvages ou plus rarement d’abeilles domestiques. Il fréquente les jardins familiaux.
Les Clairières :
Ce secteur a finalement fait l’objet de peu d’observation durant l’été mais on peut tout de même citer la présence de la Noctule commune (Nyctalus noctula), chauves-souris assez rare dans la région ; elle a été contactée au détecteur à ultrasons. Egalement une découverte régionale faite par Philippe Mothiron dans son jardin, la Corythée du Cyprès (Thera cupressata), une espèce qui fréquente normalement les littoraux sud et ouest de la France.
La plaine agricole :
Les secteurs agricoles sont souvent délaissés par les naturalistes, la preuve nous n’avions que 165 observations dans ce secteur avant de commencer nos inventaires.
Pourtant nous y avons fait quelques découvertes intéressantes. Deux espèces de plantes messicoles (flore sauvage accompagnatrices des cultures) globalement en fortes régression dans la région ont été trouvées en bordure de champ là où elles échappent aux pesticides et à la moisson. Le Mouron bleu (Lysimachia foemina) et le Bleuet (Cyanus segetum).
Un petit chemin sec en bordure de haie et riche en fleur a fait l’objet de la découverte, par Clément et Mélanie, de la Zygène de la Coronille (Zygaena ephialtes). Il s’agit de la 3ème localité des Yvelines pour cette espèce classé « vulnérable » sur la liste des papillons de jour zygènes de la région. Sur ce même chemin, quelques temps après, l’Hespérie du Chiendent (Thymelicus acteon), un papillon de jour également classé « vulnérable » fut observé. Ce dernier serait toutefois en progression, favorisé par le réchauffement climatique.
La résidence la Garenne :
Ce vaste espace vert au patrimoine boisé important et connecté au Bois de Verneuil, présente un fort potentiel pour la biodiversité avec son étang et ses ruisseaux.
Certaines plantes rappellent le passé marécageux de ce secteur avec notamment le Samole de Valérand (Samolus valerandi), « quasi-menacé » sur la liste rouge de la flore d’Île-de-France qui pousse aux abords des ruisseaux et sources. On trouve également des orchidées comme la Platanthère à fleurs verdâtres (Platanthera chloranta) qui pourraient davantage s’exprimer si la gestion n’était pas localement trop intensive.
L’étang semble particulièrement important pour les chauves-souris puisque au moins 5 espèces différentes viennent y chasser, attirées par les insectes.
La source qui coule Allée de la Source a fait l’objet de l’une des découvertes les plus intéressantes de l’été avec l’observation d’une exuvie (enveloppe sèche de la larve) d’une grande libellule, le Cordulégastre annelé (Cordulegaster boltonii). Cette observation prouve la reproduction de l’espèce à cet endroit pour cet odonate exigeant qui affectionne les sources et ruisseaux de bonne qualité.
Par la diversité de ses habitats (forestiers, ouverts et semi-ouverts, humides et secs) préservés, Verneuil-sur-Seine offre un important potentiel d’accueil pour la biodiversité. Nous souhaitons le mettre en lumière avec cet atlas de la biodiversité pour améliorer sa prise en compte à l’avenir.
Si les découvertes ont été nombreuses cette année, il ne fait pas de doute qu’il reste encore beaucoup d’espèces à observer et à identifier sur notre commune. N’oublions pas que l’émerveillement est le premier pas vers le respect.
Photos en en-tête : étang du Gallardon
Photos : Benjamin Fougère, Clément Bourdon et Philippe Mothiron
Nous remercions Mme Ruivo, MM. Le Saout et Dalle pour nous avoir donné l’accès respectivement au parc de la résidence La Garenne, au Parc de l’Ecole Notre-Dame-les-Oiseaux et à l’aérodrome.
Synthèse Parc Résidence La Garenne
Bravo pour le travail effectué.