Un guide technique pour rénover en tenant compte la biodiversité

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L’édition de ce guide découle d’un constat alarmant : les espèces anthropophiles (vivant au voisinage de l’homme) qui trouvent refuge dans le bâti accusent une perte d’habitat de plus en plus importante. Certaines de ces espèces s’observent facilement lorsqu’elles sont présentes, c’est le cas de l’Hirondelle de fenêtre avec ses nids caractéristiques. En revanche, l’Hirondelle rustique, le Martinet noir et le Moineau domestique cachent leurs nids (sous les tuiles par exemple) et sont moins visibles. C’est également le cas des chauves-souris et des rapaces nocturnes bien plus discrets.

Hirondelle rustique (photo Benjamin Fougère).

En quelques chiffres, d’après le suivi STOC (Suivi Temporel des Oiseaux Communs), en Île-de-France sur le période 2001-2023 la tendance des populations est alarmante :

  • Hirondelle de fenêtre : -66%
  • Hirondelle rustique : -76%
  • Martinet noir : -72%
  • Moineau domestique : -53%

En ce qui concerne les chauves-souris, les résultats du suivi du Museum National d’Histoire Naturelle montrent un déclin significatif pour la Pipistrelle commune avec une baisse de 55% en Île-de-France entre 2006 et 2016.

Il est important de rappeler que toutes les espèces de chauves-souris et la plupart des oiseaux utilisant le bâti sont protégés par le Code de l’environnement. Sauf dérogation, les nids ne peuvent être détruits même en dehors de la période de reproduction.

Pipistrelle commune (Photo Benjamin Fougère).

Comment agir ?

La première chose à faire est de prendre conscience de la présence potentielle de ces espèces lorsque des travaux sont envisagés (rénovation, démolition etc.). En fonction des périodes de l’année, la sensibilité des espèces et l’impact ne sera pas le même. Le tableau ci-dessous montre par exemple que les chauves-souris, qui peuvent trouver refuge dans les combles et les caves, ont une sensibilité forte en hiver (période d’hibernation) mais aussi à partir du printemps et en été (période de mise bas et élevage des jeunes). En ce qui concerne les oiseaux, la période sensible se situe davantage à partir du printemps et une bonne partie de l’été (plusieurs couvées sont possibles). La période la moins impactante pour débuter des travaux serait la fin de l’été, à partir de septembre jusqu’à début novembre.

Périodes de sensibilité pour la faune du bâti tout au long de l’année.

Les collectivités ont un rôle important à jouer puisqu’elles sont l’autorité compétente en aménagement du territoire à travers des documents de planification de l’urbanisme comme le PLUi. Il est possible d’y intégrer des orientations ou des règles relatives à la rénovation et la préservation de la biodiversité. Les atlas de la biodiversité communale ou intercommunale peuvent permettre de mieux connaître la répartition de la biodiversité au sein du bâti.

Les collectivités ont également à leur disposition trois dispositifs qui sont applicables aux façades (ravalement ou modification de l’aspect extérieur) et qui donnent l’opportunité de formuler des recommandations sur la préservation des espèces inféodées au bâti et de rappeler la réglementation applicable aux espèces protégées.

Trois exemples :

  • Ravalement de façade : une déclaration préalable est obligatoire uniquement dans les secteurs sauvegardés, sites classés ou inscrits, réserves naturelles ou parcs nationaux… ;
  • Modification de l’aspect extérieur d’un bâtiment : une déclaration préalable est obligatoire ;
  • Travaux de ravalement ou de modification de l’aspect extérieur sur un immeuble classé au titre des monuments historiques : dépôt d’un permis de construire.

En tant que particulier nous pouvons agir individuellement en décalant par exemple la période de travaux, mais aussi en faisant appel à des associations comme la LPO pour les oiseaux ou Azimut230 pour les chiroptères afin de trouver des solutions à moindre coût. Anticiper permet bien souvent d’être plus efficace, de ne pas prendre de retard sur le projet et de préserver les espèces présentes. Il s’agit donc de garantir l’absence d’individus au moment des travaux pour éviter tout risque de mortalité.

Quelques cas concrets qui peuvent être mis en place avec un écologue ou une association de protection de l’environnement :

  • Pour les chauves-souris, il convient de mettre en place un système leur permettant de sortir de l’habitat (les combles par exemple) sans pouvoir y entrer à nouveau (comme un tube à paroi lisse sur lesquelles elles ne peuvent pas s’agripper).
  • Pour les oiseaux, une bâche ou un filet est à mettre en place avec pose d’un évacuateur sur l’intégralité des anfractuosités accessibles.

Pendant les travaux et même après ceux-ci, il est possible de mettre en place des habitats de substitution comme des gîtes, des nichoirs, des nids artificiels ou la modification d’un élément architectural permettant aux espèces de trouver un habitat de substitution provisoire le temps des travaux. C’est le cas par exemple de l’installation de nichoirs temporaires sur des échafaudages. Selon les travaux, ces aménagements peuvent être permanents.

Ce guide très complet au moins devrait permettre de prendre conscience que parfois nos bâtiments abritent beaucoup d’animaux, et que si elle n’est pas toujours visible, la faune peut parfois utiliser des endroits improbables. L’objectif ici est de préserver cette biodiversité si particulière que nous côtoyons tout en répondant aux enjeux environnementaux de rénovation du bâti et d’isolation pour une meilleure efficacité énergétique. Cela demande parfois des efforts importants, de la tolérance et de dépasser les clichés et les peurs que peuvent susciter certains animaux.

Le guide complet est téléchargeable sur le site de la LPO :

https://www.lpo.fr/la-lpo-en-actions/mobilisation-citoyenne/nature-en-ville/renovation-du-bati-et-biodiversite/renovation-du-bati-et-biodiversite-le-guide-technique

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